08/09/2025

Voir les landes de Lanvaux autrement : marcher, regarder, comprendre

Les landes de Lanvaux : un plateau, mille histoires

Quand on parle de Bretagne intérieure, les collines de Lanvaux, déployées du secteur d’Elven à Questembert et longeant la vallée de l’Arz, réveillent un mot oublié : “lande“. Ici, le granit affleure, la bruyère court et la lande s'étend à perte de vue, parsemée de blocs, de houx et de pins tordus par les vents. Une Bretagne sans phare ni grand sable, mais pleine de paysages puissants et de souvenirs ancrés dans la pierre.

Le massif de Lanvaux tranche avec la carte postale côtière. Ses lignes de crête culminent autour de 150-170 mètres (le point le plus haut, entre Plaudren et Trédion, s’élève à 176 m, source : IGN). Ce n’est pas l’Alpe, mais dans ce département à dominante douce, la différence de relief frappe. Des forêts feuillues alternent avec des clairières de lande sèche ou humide, selon le sous-sol. Les villages, posés sur les replats ou à l’abri des contrebas, reprennent dans leur pierre la couleur grise-rose du granite local.

Approcher les landes de Lanvaux : c’est par où, c’est comment ?

Première chose : ici, on ne trouve pas une seule lande. La “lande de Lanvaux“ désigne une série de plateaux boisés et de terres pauvres, très morcelés, qui courent sur une large bande centrale du Morbihan. Le GR38, plusieurs chemins communaux et l’ancienne “Voie Verte Questembert-Mauron“ offrent des accès faciles et balisés (sources : Comité Départemental de Randonnée Pédestre du Morbihan et Conseil Départemental).

  • À l’ouest : du côté de Grand-Champ, Branderion, Plaudren – zones de forêts anciennes et landes éparses.
  • Au centre : l’alignement mégalithique de Larcuste sur la commune d’Arzal (un site méconnu) et les abords du château de Trédion.
  • À l’est : autour de Malansac et Rochefort-en-Terre, les failles abruptes proposent les panoramas les plus ouverts.

L’accès se fait le plus souvent par de petits parkings communaux, loin de tout. Parfois, un panneau en bois, un balisage jaune ou rouge suffit à signaler le départ. Tout l’esprit du lieu tient dans cette discrétion.

Choisir la belle lumière : les landes selon l’heure et la saison

Sur la lande, tout change avec la météo et la lumière. En hiver, l’humidité gomme les couleurs, mais l’ambiance prend une teinte argentée, presque mystérieuse : parfait pour les amateurs de brouillard et d’arbres fantômes. Dès mars, la lande s’éveille, les ajoncs jaunes s’embrasent, puis vient l’explosion de la bruyère violette vers juillet/août. À l’automne, les fougères se teintent de rouille et d’or ; les chevreuils se risquent près des sentiers (source : Bretagne Vivante).

Pour admirer un panorama, rien de tel qu’une lumière rasante matin ou soir : les ondulations du plateau, infimes à midi, deviennent évidentes, avec des jeux d’ombre dignes des Appalaches (à l’échelle bretonne !).

Panoramas à ne pas manquer : suggestions et points de vue locaux

  1. Les hauteurs de Plaudren (Lintever)

    À Lintever, sur la commune de Plaudren, le GR38 longe la crête. Par temps clair – après la montée raide depuis Mané Gouen – on devine les reliefs du Loc’h à l’ouest et, parfois, au loin, les éoliennes de Bignan. Là, les plus belles perspectives se dessinent vers 19h d’avril à septembre, quand le soleil tombe derrière les chênes tordus.

  2. Le “Rocher du Cerf“ près de Trédion

    Signalé par un modeste caillou gravé, ce point surplombe la vallée du Trévelo et donne, à 172m, une vue rare sur un patchwork de landes et de bois, parfois jusqu’à 15 km vers la Brière lointaine. Les locaux racontent y entendre les grands cerfs à la brame à l’automne.

  3. La lande de Coetquidan

    Moins connue, une portion très ouverte sur les marges du camp militaire (attention au balisage : suivre les horaires de permission de circulation). Entre landes basses, pins noirs et blocs de quartz, on a l’impression de marcher sur un balcon au-dessus du pays de Guer. Les botanistes en quête d’orchidées (34 espèces recensées, source : Conservatoire Botanique National de Brest) y font chaque printemps des relevés précieux.

  4. Le plateau de Malansac

    Ici, la “faille de Lanvaux“ structure le paysage. Le chemin des “Hauts de Malansac“ offre un point de vue idéal pour observer les fractures du plateau : vallées encaissées, chaos de schiste, dentelles de châtaigniers. Au crépuscule, les ombres glissent sur les interlignes du paysage : il faut simplement s’asseoir, attendre et regarder.

Marcher malin : équipements et conseils locaux

Sur la lande, la météo change vite. Les brumes matinales allongent la fraîcheur même l’été ; dès l’après-midi, le vent tire sur les ajoncs et rappelle que rien n’est plat, ici, sinon la carte IGN. Prévoir :

  • Chaussures à tige haute – le sentier est souvent caillouteux, la lande envahie par endroits par les genêts
  • Vêtements coupe-vent et léger imperméable (la bruine remonte sans prévenir)
  • Eau et éventuellement jumelles : pour les balbuzards nicheurs (source : LPO Bretagne) ou les chevreuils en lisière au lever du jour
  • Carte ou GPS : le balisage se fait rare sur certaines portions, à la mode ancienne
  • Respect absolu des zones signalées “propriété privée“ ou “zone militaire” : la lande est morcelée, il faut être attentif

La flore des landes de Lanvaux, longtemps exploitée pour la pâture, le bois de chauffage ou le balisage naturel des villages (“bornes de landier”), regagne aujourd’hui du terrain après des décennies d’enrésinement et de déprise agricole. Marcher ici, c’est fouler un territoire fragile, peuplé d’ajoncs, de molinies, de bruyères à quatre angles, souvent protégées (réserves Natura 2000 pour certains secteurs).

Rencontres et patrimoine : marcher, c’est aussi regarder ailleurs

Outre le paysage, chaque landier cache des histoires. Petites fermes en granit (parfois habitées, parfois mangées par les fougères), cromlechs effondrés – témoins d’un terroir néolithique très dense –, fontaines de dévotion et murets où s’arrêtent les voyageurs. Plusieurs chapelles isolées jalonnent la lande, souvent liées à un saint local, et accueillent les fameux “pardons“ ou, plus rarement, une cérémonie de “troménie“ (ceinture de processions qui redonne vie à l’espace sacré, source : Écomusée du Pays de Vannes).

Sur la lande, le silence est parfois troublé par le pas d’un joggeur, le passage discret d’un cavalier ou, à la saison, le travail d’un apiculteur transhumant. Les villages, eux, célèbrent parfois la lande – à Plaudren, le marché du printemps propose des tisanes de bruyère et des miels de lande, tandis que quelques artisans tressent encore des paniers de joncs selon les anciens usages.

À noter : la lande de Lanvaux s’est forgée, au milieu du XIXe siècle, une réputation de terre de “chauffeurs” et de contrebandiers, profitant de ses recoins pour contourner les routes royales et éviter les collecteurs (histoire relatée dans plusieurs ouvrages locaux, voir “Histoires et Légendes du Pays de Lanvaux”, éd. CPE).

Quelques itinéraires à tester selon sa curiosité

  • Circuit de la Lande Grise (Plaudren, 9 km) – Jolie boucle au départ de la chapelle Saint-Bily, traversant petits bois, landes maigres et points de vue sur trois vallées successives. Peu fréquenté.
  • La Voie Verte Questembert-Mauron – Non loin de la lande, ancienne ligne de chemin de fer transformée en voie douce, idéale à vélo pour les familles : portions larges, faune visible (hérons, buses variables) et possibilités d’arrêts improvisés sur les “éperons“ de lande.
  • Mégalithes et landes, entre Larcuste et Limerzel – Boucle (11 km) mêlant menhirs isolés, dolmens dégagés par la lande et petits chaos de pierres, à faire au lever du soleil pour le chant des fauvettes (départ du parking du village de Limerzel).

Pour prolonger : guides locaux et ressources utiles

Pour rapporter un peu de la lande : fromages de chèvre (cheptel significatif sur le plateau central), miels, ou sirops artisanaux aux fleurs de bruyère (plusieurs apiculteurs accueillent sur rendez-vous dès avril).

Marcher sur la lande de Lanvaux : une expérience de l’authentique

La lande de Lanvaux se dévoile à celui ou celle qui prend le temps : avancer sur un sentier, écouter le vent jouer dans les bruyères, s’arrêter devant un chaos de pierres ou lever les yeux vers la ligne grise des collines. Ici, pas de foule, pas d’effets spectaculaires : juste l’impression d’être au cœur d’une Bretagne à vif, où la nature reprend ses droits.

Chacun et chacune construit sa propre lecture du panorama. Venir sur la lande, c’est poser un autre regard sur le Morbihan : moins connu, mais inoubliable quand on prend la peine de s'attarder.

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