24/09/2025

Pédaler dans les bois : explorer les forêts du Morbihan à vélo, autrement

Au départ : une envie de forêt brute, à un coup de pédale

Quand on pense à la Bretagne, on pense souvent à la mer, aux ports, aux îles, au vent salé sur la figure. Dans le Morbihan, pourtant, la forêt fait partie du décor, discrète mais obstinée. Entre landes, chênes vénérables, bois de pins, elle dessine la toile de fond d’une vie plus terrienne, presque immobile par endroits. Mais il suffit d’un vélo, d’un peu de temps, et d’un œil curieux pour que s’ouvrent tous ces paysages, bien loin des grandes routes.

Ici, profiter des forêts en vélo, c’est l’occasion de s’offrir une parenthèse verte, d’explorer les coins moins bavards, où le granit et la mousse se tutoient, où la lumière fait ce qu’elle veut avec les sentiers. Ce n’est jamais un exploit sportif, c’est une invitation à ralentir, à laisser entrer l’odeur de la terre et la voix des oiseaux.

Les grands bois du Morbihan : choisir sa forêt

Parmi les 92 000 hectares de forêts que compte le département (source : ONF), il existe bien des visages à découvrir. Certaines sont vastes, domaniales, faciles à parcourir. D’autres sont minuscules, enclavées entre deux routes ou deux villages, mais tout aussi riches.

Quelques forêts et bois à explorer à vélo :

  • Forêt de Lanouée — La plus grande du Morbihan (environ 4 000 hectares), entre Josselin et Ploërmel, est idéale pour ceux qui veulent lâcher prise entre pins et vallons. Elle accueille notamment une boucle VTT balisée de 40 km et plusieurs circuits VTC familiaux.
  • Forêt de Brocéliande (en Morbihan Est) — Même si elle déborde sur l’Ille-et-Vilaine, la « lisière » morbihannaise autour de Tréhorenteuc propose des pistes, des chemins légendaires, et des coins plus secrets comme le Val sans Retour ou les rives de l’Aff.
  • Bois de Coëby — Autour de Questembert, près de 250 hectares de feuillus, longs chemins plats et zones humides rappellent les anciennes pratiques paysannes. Terrain parfait pour la balade familiale, notamment sur le circuit de Moulin Neuf-Ambon.
  • Bois d’Amour (Saint-Avé) — Accessible à tous, il propose plus de 10 km de sentiers forestiers, avec la possibilité de rejoindre les voies vertes alentours. On y croise souvent des VTT, des vélos cargos, et des familles le week-end.
  • Bois du Hingair (Lorient) — Petite poche arborée dans le pays de Lorient, elle est appréciée pour ses sentiers sinueux propices à l’apprentissage ou à une pause fraicheur au cœur de la ville.

Quelques chiffres parlent d’eux-mêmes : plus de 200 km de circuits forestiers balisés sont ouverts aux vélos dans le seul grand ouest du Morbihan, et près de 17 % du territoire departmental est recouvert de bois (DREAL Bretagne, chiffres 2022).

Circuits et conseils pratiques : rouler en forêt, mais pas n’importe comment

VTT, gravel, vélo électrique… tout le monde peut trouver sa formule

La plupart des grands bois sont ouverts au VTT ou au vélo tout-chemin ; certaines parties restent caillouteuses, voire sableuses. Les « gravel bikes » (ces vélos entre route et VTT) gagnent du terrain ici ces dernières années, car ils permettent de s’aventurer sur de longues pistes ou sections forestières sans craindre les crevaisons.

  • VTT : idéal pour les circuits techniques ou les sous-bois humides. De nombreux clubs (ex : VTT Questembert, Cyclo Randonneurs Vannetais) organisent des sorties régulières, parfois ouvertes aux visiteurs (voir calendrier Fédération Française de Cyclisme Bretagne).
  • Vélo de randonnée : à l’aise sur les chemins stabilisés, permettant de découvrir les lisières ou enchaîner forêt et villages.
  • Assistance électrique : les forêts du Morbihan ne sont pas des cols alpins, mais certains dénivelés inattendus (Forêt de Lanouée ou collines de Brocéliande) font apprécier un petit coup de pouce, surtout en famille.

Les bonnes pratiques à respecter dans les bois

  • Rester sur les sentiers balisés : La circulation hors-piste abîme le sol et la végétation (règlement ONF). Les itinéraires officiels sont généralement tracés avec soin, pour préserver la faune et éviter les zones humides fragiles. Sur les panneaux, cherchez le balisage VTT (triangle+deux ronds) ou les liserés blanc et rouge (GR).
  • Respecter la nature et ses habitants : Ici, sangliers, chevreuils, écureuils et chouettes partagent la forêt. Un vélo silencieux, c’est l’occasion rare d’en apercevoir. Le bruit, l’abandon de déchets ou le ramassage de plantes sont des gestes à proscrire. Même quand les champignons sont abondants, ne cueillez que ce que vous connaissez, et modérément (Infos : Fédération mycologique de Bretagne).
  • Prendre en compte les usages locaux : En forêt morbihannaise, vous croiserez parfois des marcheurs, des cavaliers, des fermiers qui traversent avec leurs troupeaux. Le sourire, la politesse, et la priorité à pied ou à cheval sont de mise – c’est du bon sens, mais ça fait partie du code local.
  • Chasse en saison : De septembre à février, informez-vous en mairie ou sur le site de la Fédération de Chasse 56 avant de partir : dans certaines zones, la circulation est déconseillée les jours de battue (des panneaux « Chasse en cours » sont alors visibles).
  • Équipement conseillé : Pneus crantés, casque, en-cas, bouteille d’eau, petit sac pour ramasser vos papiers ou restes de pique-nique – et, toujours, une carte IGN ou une appli genre Komoot, car le GPS décroche vite sous les vieux chênes mouillés.

Des itinéraires coup de cœur et leurs petites histoires

Il y a, dans chaque parcelle morbihannaise, une ambiance particulière. Voici quelques boucles, chacune avec son petit grain :

  • Boucle Coeur de Lanouée (28 ou 40 km) : Chemins souples, ancienne voie charretière, passages ombragés entre pins. L’histoire de cette forêt est marquée par l’exploitation du bois pour la construction navale au XVIII siècle. On croise encore des restes de charbonnières, discrètes clairières où le bois était lentement brûlé pour produire le précieux charbon de bois (source : Archives départementales du Morbihan).
  • Entre contes et mousse en Brocéliande : La boucle « au fil des légendes » (20 à 25 km autour de Tréhorenteuc et Paimpont) permet de rouler sur les traces des récits arthuriens. Le sentier, tout en relances, passe près du miroir aux fées – attention terrain parfois gras et racines glissantes. L’expérience : mercredi matin, si la météo est grise, on se croirait dans un décor de roman…
  • Le Circuit des Enclos à Questembert : Une boucle facile de 15 km au départ du centre-ville, qui longe bois, prairies, étangs du Moulin Neuf et quelques chemins creux typiques. On peut s’arrêter à la longère de Kervault (au printemps, grand tapis de jacinthes sauvages, attention à ne pas les piétiner).
  • Saint-Avé et le Bois d’Amour : Parfait pour une heure tranquille à l’abri du vent, ou en famille. Les allées droits comme des traits conduisent à de petites mares, repaire des libellules. Après la balade, passage recommandé au café du bourg pour refaire le monde.

Prendre le temps : rencontres et imprévus en forêt morbihannaise

Rares sont les forêts où la rencontre humaine n’a pas sa place. Qu’on roule très tôt le matin, casquette enfoncée et café fumant dans le bidon, ou le dimanche après-midi, il y a toujours des histoires à croiser. Dans la Forêt de Lanouée, il n’est pas impossible d’apercevoir un groupe de bénévoles en pleine rénovation d’un vieux calvaire, ou d’échanger avec un garde forestier qui explique les enjeux du reboisement face aux sécheresses de plus en plus marquées (été 2022 : la sécheresse a endommagé 12 % des jeunes plants dans les forêts départementales – source : Ouest-France).

Parfois, c’est une rencontre plus discrète : un vieux monsieur sur un vélo rouillé qui récolte des pommes pour les donner à la boulangerie du coin, ou un groupe d’enfants partis construire une cabane et qui vous demandent, l’air de ne pas y toucher, le nom d’un oiseau entendu sur la branche.

Se laisser surprendre, en forêt, c’est aussi accepter les petits chaos : une averse qui force à s’abriter sous une souche, des chemins soudain barrés par des branches tombées dans la nuit, un portable sans signal. C’est là que la forêt retrouve son pouvoir : elle oblige à oublier l’agenda, à regarder autour, à sentir ce citron boisé que certaines fougères libèrent après la pluie.

À savoir : infos concrètes et ressources locales

  • Location de vélos : Certaines mairies rurales (Saint-Avé, Questembert, Josselin) proposent désormais des flottes de vélos à louer, VTT ou VTC, à prix doux. Pensez aussi aux associations type Vélorient sur Lorient ou La Roue Libre à Vannes.
  • Meilleure saison : Le moment rêvé ? Avril-mai (avant les moustiques), septembre-octobre (pour la lumière et les cèpes). En hiver, certaines boucles deviennent impraticables sans pneus larges.
  • Sources officielles de circuits: Consultez la carte interactive du Comité régional du tourisme Bretagne ou les sites officiels des communautés de communes (Questembert, Ploërmel, Brocéliande).
  • Entretien et sécurité: La météo bretonne peut surprendre. Verifiez toujours la praticabilité des sentiers sur les panneaux d’accueil en forêt ou contactez l’ONF pour Lanouée ou Brocéliande.

Forêts en roue libre : un art de prendre la Bretagne autrement

Découvrir les forêts du Morbihan en vélo, c’est s’offrir la Bretagne qui ne fait pas d’effets de manche : celle qui joue avec la lumière, qui s’écoute, qui se vit à la pédale tranquille. Que ce soit pour quelques kilomètres entre deux villages ou pour une grande boucle entre hêtres et pins, voilà une manière d’habiter le territoire, de s’imprégner de ses parfums et de ses usages, au rythme lent du souffle et du cœur qui tape. Quiconque pose les roues dans le sous-bois du matin comprend que le vrai Morbihan aime rester à l’ombre – il attend juste qu’on prenne le bon chemin.

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