28/09/2025

L’arrière-pays du Morbihan : dix lieux naturels encore à l’abri des foules

Un patrimoine naturel discret mais remarquable

Le Morbihan est l’un des départements bretons les moins densément peuplés (110 habitants/km², INSEE, 2021). Cela laisse respirer les paysages. Si près d’un quart du département appartient au réseau Natura 2000 ou bénéficie d’une protection environnementale, c’est vers le centre et les abords des Landes de Lanvaux, du Blavet et du Scorff qu’il faut lever les yeux pour retrouver des espaces vraiment préservés. Certains se révèlent à l’automne, d’autres brûlent de mille couleurs au printemps, mais tous ont en commun d’être encore oubliés, parfois même des voisins.

Landes de Lanvaux : cœur boisé du Morbihan

Dans la géographie morbihannaise, la crête des Landes de Lanvaux fait office de dorsale, déroulant vingt-cinq kilomètres de collines coiffées de pins, de landes sèches et de chaos granitiques. Ce n’est pas la lande du Cap Fréhel : ici, pas d’à-pic, mais un relief doux, usé, où le pas s’enfonce dans la bruyère.

  • Le site des Pierres Droites, à Monteneuf : Bien moins connu que Carnac, mais tout aussi fascinant, ce site aligne plus de 420 menhirs au milieu des ajoncs. On peut s’y promener en solitaire, croiser un animateur nature en pleine démonstration (feu sans allumettes, flèche taillée à la main). En 2023, moins de 30 000 visiteurs se sont rendus sur le site, comparés aux 400 000 de Carnac (source : Office de tourisme de Brocéliande).
  • La forêt du Brambily : Plus à l’ouest, Brambily est une forêt privée mais traversée de quelques chemins communaux. Sur la lisière, blotti près de la chapelle Saint-Colomban, coule le ruisseau du Breuil. En hiver, on aperçoit parfois des chevreuils au crépuscule.

Vallée du Blavet : entre crêtes et chaos granitiques

Le Blavet est, pour les pêcheurs comme pour les promeneurs, l’une des vallées les plus sauvages du département. Ce cours d’eau alimente un patrimoine naturel exceptionnel, jalonné d’écluses et de sous-bois mystérieux.

  • Les Gorges de Castennec : Entre Baud et Saint-Nicolas-des-Eaux, la rivière s’encaisse brusquement pour former des gorges de quartzite et de granite. Le sentier offre des panoramas souvent désertés, hormis les rares pêcheurs de brochets ou les kayakistes avertis.
  • Le Chaos de Pont Calleck : À Lignol, sur les contreforts du pays Vannetais et du pays Pourlet, le Blavet tourbillonne entre des blocs rocheux, créant des mini-cascades. L’endroit attire des familles d’hérons et, en mai, le bal des libellules.

Selon la Fédération de pêche du Morbihan, moins de 1000 permis de pêche sont délivrés chaque année pour ce secteur (pecheapied56.fr) : un signe d’authenticité rare.

Marais de Séné : un écrin faunistique méconnu loin du Golfe

Si la réserve de Séné est réputée en bord de golfe, son prolongement vers l’arrière-pays, notamment au niveau du marais de Duer, mérite un détour amorcé à vélo ou à pied depuis le bourg. On y observe, en matinée, plus de 150 espèces d’oiseaux migrateurs, dont la rare Échasse blanche qui niche parfois dans les joncs (Réserve naturelle des marais de Séné).

  • Accès confidentiel : La digue de Duer, fermée aux véhicules, offre deux kilomètres paisibles. Prévoyez des jumelles au printemps : héron pourpré et spatule blanche sont fidèles au poste.

Le Sillon de Guégon et la vallée de l’Oyon : une Bretagne intérieure

Près de Josselin, le Sillon de Guégon est un curieux défilé boisé, classé Espace Naturel Sensible. Ici, pas de guide touristique, mais un sentier oublié file en creux de vallée, longeant l’Oyon et ses prairies humides.

  • Points marquants :
    • Chutes granitiques accessibles après la chapelle Sainte-Méen
    • Observation discrète du cincle plongeur et du martin-pêcheur, espèces emblématiques des petites rivières bretonnes

La vallée est aussi réputée localement pour ses jonquilles sauvages, qui tapissent les sous-bois entre mars et avril. L’an passé, une "fête de la jonquille" improvisée a rassemblé plus de cent personnes du voisinage, symbole d’une nature partagée sans tapage.

Les landes de Kerfontaine à Plumelec : panorama et vent d’altitude

On imagine rarement le Morbihan avec des points hauts, pourtant Plumelec monte à 152 m, point culminant du département. Sur les hauteurs de Kerfontaine, la lande à bruyères sauvages donne, au matin, une lumière singulière sur la vallée de la Claie.

  • Balade au lever du soleil : Les anciens du coin viennent encore y ramasser l’ajonc pour l’allumage du poêle. En juillet, la lande devient violette et embaume l’odeur de résine.

Hêtres tortillards et chaos de Quénécan : limite du Morbihan méconnue

À l’extrême nord du département, vers Saint-Aignan, la forêt de Quénécan grignote le Morbihan depuis le département voisin, mais recèle des curiosités naturelles rares.

  • Le site des hêtres tortillards : Arbres séculaires, écorces grises et tordues, atmosphère humide. Classé Natura 2000, ce noyau forestier n’est balisé que sommairement. L’automne y révèle un chatoiement unique, qui n’a rien à envier à la forêt voisine de Brocéliande.

Autres perles discrètes de l’arrière-pays : suggestion pour un carnet de routes

  • Le marais de Kergrist à Val d’Oust : Espace humide d’une grande biodiversité (orchidées sauvages recensées en mai, source : Bretagne Vivante), accessible par sentier en face du moulin de la Ville Moisan.
  • Le vallon de Kermadio à Locoal-Mendon : Marais salants relictuels et labyrinthes de fossés, partiellement boisés, à l’écart des circuits balisés.
  • Les tourbières de Sérent : Stations de droséras à observer, carnivores indigènes de ces terres humides. Un écosystème fragile à parcourir sur caillebottis, avec discrétion.

Quelques conseils pour découvrir ces sites sans les abîmer

  • Préférez la marche ou le vélo : Le Morbihan intérieur ne se parcourt vraiment qu’à pied (près de 3000 km de sentiers balisés selon le Département du Morbihan).
  • N’emportez rien (sauf souvenirs), ne laissez rien derrière vous.
  • Respectez la tranquillité : le chant d’un loriot suffit à meubler le silence, pas besoin de haut-parleur bluetooth.
  • Privilégiez les visites hors week-end si possible.
  • N’hésitez pas à passer par les marchés de village ensuite : chaque terroir y prolonge son paysage dans l’assiette.

Pour ceux qui veulent aller plus loin

Découvrir l’arrière-pays du Morbihan, c’est apprendre à lever les yeux, à écouter, à prendre le temps. On y entre souvent par hasard, on y revient par envie. Pour préparer une balade, le site du Comité régional de randonnée de Bretagne ou les cartes IGN locales sont des alliés solides. Échanger avec les habitants – au marché, au café du coin – donne souvent accès à d’autres chemins, à des récits qui, plus que des sentiers, dessinent le vrai visage de ce territoire.

L’arrière-pays morbihannais ne se dévoile jamais en bloc. C’est par fragments, au fil des saisons, des rencontres et des hasards, que se rafraîchit la mémoire locale des lieux. Les sites naturels évoqués ici ne font pas la une des guides, c’est ce qui leur donne cette saveur intacte, ce parfum de possible.

Vinrent un jour s’asseoir sur la lande un peintre, un conteur ou un promeneur venu d’ailleurs chercher un peu de silence. Ce sont eux, aussi, qui font vivre ces paysages d’ombre et de lumière. À leurs pas, reste de découvrir, à sa manière, la Bretagne intérieure.

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